Mai 2024 - Hennings

Fiche n°51 – Mai 2024

Prison de Emmy Hennings

Année de première publication : 1919

Titre original : Gefängnis

Monts Métallifères éditions, 2021, pour la présente édition

Traduit de l'allemand par Sacha Zilberfarb

Munich 1914.

En attente d’une audition dans une affaire judiciaire, une jeune femme artiste de cabaret souhaite toutefois partir se produire à Paris, haut lieu de la vie artistique de l’époque. Afin de ne pas être considérée comme fuyarde, elle part signaler son départ auprès de la police… mais se fait malgré tout arrêter puis incarcérer pour soupçon de délit de fuite.

Plongée dans l’enfer carcéral, la narratrice décrit avec une liberté de ton presque effrayante le temps qui s’étire et les montées d’angoisse face à l’absurdité de la situation. Elle retrouvera le goût de vivre auprès de ses compagnes d’infortunes dont les délits semblent

si insignifiants.

Prison, inspiré d’une expérience vécue par l’autrice, happe dès ses premières pages. Sans détours de style, sans recherche apparente, Emmy Hennings déploie une langue toute en sympathie pour les gens dont on ne parle jamais et à qui la littérature ne donne jamais la parole.

L'autrice

Emmy Hennings naît le 17 janvier 1885 au sein d’une famille modeste à Flensbourg, petite ville du nord de l’Allemagne. Chansonnière et cabarettiste, elle épouse à dix-huit ans un comédien ambulant avec qui elle parcourt le Schleswig-Holstein de scène en scène. Elle divorce en 1909 pour épouser l’écrivain Ferdinand Hardekopf, ami de Gide et de Cocteau. En 1913, elle s’installe à Munich et fréquente le café Simplizissimus où elle interprète des chansons de cabaret populaire et ses propres poèmes. Elle y fait la connaissance d’Hugo Ball avec qui, entre autres, elle participe en 1916 à la création du mouvement dada au Cabaret Voltaire à Zurich. L’année suivante, ils partent tous les deux pour le village suisse d’Agnuzzo, se convertissent au catholicisme et y mènent une vie ascétique. C’est à ce moment là qu’Emmy Hennings décide d’entreprendre la rédaction de ses romans à caractère autobiographique dont Prison qu’elle publie en 1919.

Citation

« Quand je palpe les murs du regard, escaladant des yeux ces hauteurs, je nous vois au fond d’une grande boîte dont, par chance, manque le couvercle. On voit le ciel, qui est beaucoup plus haut encore que les murs. J’ai observé précisément cette petite découpure de ciel. Le ciel est doux. Le ciel est infini. Dire que je le crois ! Du ciel je sais ceci : il est accommodant et beaucoup plus grand que le petit fragment rectangulaire que l’on daigne nous concéder dans cette cour. »

Fiche rédigée par Thomas Riom